Dans le
secteur du bâtiment, la qualité architecturale est généralement perçue comme
l’apanage de l’architecte. Comment ignorer, pourtant, que le maître d’ouvrage —
public ou privé — joue un rôle prépondérant, voire déterminant, dans le bon ou
le mauvais agencement architectural d’un projet à travers ses choix, son
arbitrage technique, économique et esthétique ?
La qualité
architecturale débute dans le cahier des charges.
Dès l’origine
d’un projet, la maîtrise d’ouvrage se doit de fixer des ambitions. Le programme
fonctionnel, le degré d’exigence esthétique, les enjeux budgétaires, les
délais, les conditions d’exploitation sont autant de paramètres, préalablement
définis, qui freinent ou libèrent l’éventuelle ressource architecturale.
Un programme
mal rédigé, flou ou incohérent peut nuire à l’intelligibilité du projet et
affaiblir sa qualité. À l’inverse, une maîtrise d’ouvrage visionnaire, dotée
d’une culture architecturale solide, peut stimuler la créativité des
concepteurs et permettre l’émergence de réalisations remarquables.
L’architecte,
un conseiller au service d’une vision.
Dans le cas où
l’architecte traduit techniquement les souhaits du maître d’ouvrage, il ne peut
se soustraire aux choix fixés par ce dernier. L’architecte est plutôt un
interprète qu’un auteur libre. Il est tenu par un contrat de mission, avec des
obligations de moyens et un devoir de conseil.
Toutefois,
lorsque la maîtrise d’ouvrage impose des solutions techniques ou des économies
financières qui ne seraient pas conformes à la qualité du projet architectural,
l’architecte voit sa liberté fortement contrainte. Nombre de projets banals,
standardisés ou appauvris esthétiquement sont la conséquence d’une maîtrise
d’ouvrage trop peu exigeante ou purement gestionnaire.
Un partage de responsabilités … déséquilibré ?
D’un point de
vue juridique, l’architecte engage sa responsabilité décennale en cas de
désordres de type structurel. La maîtrise d’ouvrage, pour sa part, n’est
presque jamais mise en cause, sauf en cas de faute grave ou d’ingérence avérée.
Pourtant, dans la réalité, beaucoup
d’échecs architecturaux relèvent de la responsabilité :
·
D’appels d’offres mal pensés ;
·
D’arbitrages au détriment de la
qualité (qui commence dans les jurys) ;
·
Ou d’un manque de dialogue
entre décideurs et concepteurs.
Que faire
alors lorsque "la commande publique souffre d’un manque de clarté dans les
programmes et d’un désengagement vers la qualité, au profit d’une logique
purement comptable" ?
Une
commande éclairée, moteur de qualité
La qualité
architecturale ne se décrète pas : elle se construit dès l’intention initiale.
Elle suppose une "maîtrise d’ouvrage instruite, exigeante et
engagée", capable de penser le projet dans sa globalité, et non comme un
simple empilement de mètres carrés.
À l’heure où les défis climatiques,
sociaux et urbains exigent des réponses fortes, le rôle de la maîtrise
d’ouvrage est plus crucial que jamais.
Former les maîtres d’œuvre, c’est bien ; mais il faut aussi "former les maîtres d’ouvrage", renforcer leur culture architecturale, parce que "la commande publique doit elle aussi être de qualité".
ليست هناك تعليقات:
إرسال تعليق